Principe : Jensen & Meckling (1976), Fama & Jensen (1983) – Analyse la relation contractuelle entre un “Principal” (qui délègue une tâche et fournit des ressources, ex: un bailleur) et un “Agent” (qui réalise la tâche, ex: une ONG). Du fait d’objectifs potentiellement divergents et d’une asymétrie d’information (l’Agent en sait plus sur l’action et le contexte local que le Principal), le Principal craint que l’Agent n’agisse pas dans son meilleur intérêt (risque de “hasard moral” ou d'”anti-sélection”). Pour pallier cela, le Principal met en place des mécanismes de contrôle et d’incitation (contrats détaillés, reporting fréquent, audits, financement fléché).
APPLICATION AUX ONG AFRICAINES : #
- La relation entre bailleurs internationaux (Principaux) et ONG africaines (Agents) est souvent caractérisée par une forte asymétrie d’information et une méfiance perçue ou réelle.
- Les bailleurs mettent en place des systèmes de contrôle exigeants (procédures complexes, indicateurs quantitatifs nombreux, conditionnalités strictes, préférence pour le financement de projets spécifiques plutôt que le financement institutionnel/core funding) pour s’assurer que les fonds sont utilisés conformément à leurs attentes.
- Ces mécanismes, bien que visant à assurer la redevabilité (“accountability”) envers le bailleur, engendrent des coûts de transaction élevés pour les ONG et limitent considérablement leur flexibilité et leur autonomie stratégique pour répondre aux besoins locaux émergents ou pour innover.
Cas concret / Éléments d’évidence : La prédominance écrasante du financement de projet (affecté, court terme) par rapport au financement institutionnel (non affecté, pluriannuel) dans l’aide aux ONG africaines est une manifestation claire de cette logique d’agence, où le contrôle prime sur le soutien à l’autonomie. Les lourdes exigences en matière de reporting sont constamment citées par les ONG comme un frein majeur.
Critique / Nuance africaine : La théorie de l’agence peut présenter une vision trop cynique ou simpliste, réduisant les ONG à des acteurs purement opportunistes. Elle ignore souvent la dimension “missionnaire” ou les motivations intrinsèques des acteurs des ONG. Elle peine aussi à intégrer la complexité des “multiples Principaux” (une ONG doit rendre des comptes aux bailleurs, mais aussi à ses bénéficiaires, à l’État, à ses membres…), créant des dilemmes de redevabilité (“upward vs downward accountability”). Enfin, elle sous-estime parfois la possibilité de construire des relations de confiance et des partenariats plus équilibrés qui transcendent la simple logique contractuelle Principal-Agent. Des ONG développent aussi des stratégies pour gérer ou “retourner” l’asymétrie d’information à leur avantage.