Courant Critique & Auteurs Clés : Pensée postcoloniale (Achille Mbembe, Frantz Fanon, Edward Said) et son prolongement dans les études décoloniales (Sabelo Ndlovu-Gatsheni, Walter Mignolo, Aníbal Quijano). Ces courants analysent la persistance des structures de pouvoir, des systèmes de savoir et des imaginaires hérités de la colonisation dans le monde contemporain.
Postulat / Argument Central : Les relations Nord-Sud actuelles, y compris l’aide au développement et le financement des ONG, ne sont pas neutres mais profondément imbriquées dans la “colonialité du pouvoir”. L’architecture financière mondiale, les conditionnalités de l’aide, les priorités thématiques et même les cadres conceptuels utilisés (développement, bonne gouvernance, etc.) perpétuent des formes de domination économique, politique et épistémique (imposition d’une manière de voir le monde) du Nord sur le Sud.
APPLICATION / PERTINENCE POUR L’AUTONOMIE DES ONG AFRICAINES : #
- Dépendance structurelle & Néocolonialisme des bailleurs : La dépendance des ONG africaines n’est pas une simple contingence technique gérable par des stratégies (RDT), mais un état structurel hérité et entretenu. Les conditionnalités (d’abord celles des Programmes d’Ajustement Structurel – PAS – des années 80/90 qui ont souvent affaibli les États et ouvert la voie aux ONG financées de l’extérieur, puis les conditionnalités politiques, de gouvernance, ou thématiques actuelles) façonnent l’espace d’action des ONG. Les priorités des bailleurs reflètent souvent leurs propres intérêts (géopolitiques, économiques, idéologiques – un néocolonialisme sous couvert d’aide) plutôt qu’un agenda endogène, limitant l’autonomie réelle à une simple marge d’exécution.
- Critique de l’Autonomie “Managée” : La notion d’autonomie promue dans les discours managériaux peut être vue comme une illusion ou un outil de contrôle : on accorde une autonomie technique et managériale à condition de rester dans le cadre idéologique et programmatique défini par le Nord.
Concepts Clés / Illustrations : Colonialité du pouvoir/savoir/être, Néocolonialisme, Dépendance structurelle, Conditionnalités, Extraversion, Gouvernementalité (au sens foucaldien, appliquée à l’aide), Épistémicide (destruction des savoirs locaux).
Illustration : L’imposition de modèles d’ONG “professionnels” et de systèmes de suivi-évaluation complexes (cadre logique, indicateurs quantitatifs) qui marginalisent les savoirs et les modes d’organisation locaux. L’agenda de l’aide qui passe rapidement d’une priorité à l’autre (VIH, puis microfinance, puis climat…) au gré des préoccupations du Nord.
IMPLICATIONS / CONFRONTATION AVEC LES THÉORIES DOMINANTES : #
- Vs RDT/Agence/Institutionnelle : Ces théories critiques ne nient pas l’utilité des stratégies de gestion de la dépendance ou de quête de légitimité, mais elles les resituent dans un cadre de domination structurelle. Elles suggèrent que ces stratégies pourraient n’être que des adaptations ou des formes de résistance à l’intérieur du système néocolonial, sans le remettre en cause fondamentalement.
- Elles questionnent la neutralité apparente des outils d’analyse managériaux et invitent à analyser le discours des bailleurs et des ONG avec un œil critique (qui définit les termes ? Dans l’intérêt de qui ?).
- Elles poussent à envisager des formes d’autonomie plus radicales, basées sur la rupture épistémique et la réappropriation de l’agenda par les acteurs du Sud.