Quels sont les principaux cadres conceptuels et les définitions opérationnelles utilisés dans la littérature pour appréhender l’autonomie stratégique des ONG/OSC africaines, et quelles sont les tensions ou débats identifiés autour de ce concept ?
Les principaux cadres conceptuels et les définitions opérationnelles utilisés dans la littérature pour appréhender l’autonomie stratégique des ONG/OSC africaines mettent en lumière la dynamique de pouvoir centrale dans leurs opérations, notamment en ce qui concerne le financement et la propriété des projets de développement. L’atteinte de l’autonomie et de l’indépendance sur le plan des politiques est un objectif clé pour les ONG africaines.
L’analyse de cette autonomie repose sur une évaluation critique des rapports complexes et multi-niveaux entre les ONG et leurs partenaires bailleurs de fonds. La littérature souligne que les expériences avec les organismes donateurs façonnent de manière cruciale la programmation des ONG, en particulier dans le domaine de l’atténuation de la pauvreté. Ainsi, l’autonomie stratégique peut être opérationnellement définie comme la capacité d’une ONG à concevoir, mettre en œuvre et assurer la pérennité de ses programmes en accord avec sa mission et les besoins des populations locales, tout en naviguant les exigences et les priorités des financeurs sans compromettre son orientation fondamentale.
Plus spécifiquement, le rapport DEFI met en évidence que l’autonomie est étroitement liée à la diversification des sources de financement pour éviter une dépendance excessive aux bailleurs de fonds internationaux. La capacité à mobiliser des ressources est directement impactée par les capacités organisationnelles des OSC. De plus, l’autonomie implique la possibilité de prioriser les besoins locaux dans l’écriture des projets, en collaboration avec la population, plutôt que de se concentrer uniquement sur les objectifs des bailleurs.
Les tensions et débats identifiés autour de ce concept sont nombreux :
- Dépendance financière vs. indépendance programmatique : Les OSC de petite taille en Afrique centrale sont souvent fortement dépendantes des financements internationaux, ce qui peut influencer la conception et la mise en œuvre de leurs programmes. La survie de ces organisations est grandement liée à ces fonds.
- Agendas des bailleurs vs. priorités locales : Les bailleurs de fonds ont tendance à financer des secteurs qui ne correspondent pas toujours aux priorités des OSC locales et aux besoins des populations. Seulement une faible proportion des subventions soutiendrait la mission de base des OSC, les poussant à réaliser des actions inadaptées aux besoins locaux mais alignées sur les objectifs des bailleurs.
- Critères des bailleurs vs. capacités des OSC : Les critères exigeants des bailleurs en matière d’audit, de structure organisationnelle, d’expérience financière et de respect des thématiques peuvent être difficiles à atteindre pour les petites OSC, limitant leur accès aux financements et donc leur autonomie. Le manque de personnel qualifié et de ressources financières adéquates au sein des OSC complexifie cette situation.
- Contextes nationaux contraignants : L’environnement institutionnel, politique et juridique dans lequel évoluent les OSC peut exercer un impact significatif sur leur financement et leur capacité à opérer de manière autonome. Par exemple, les OSC travaillant sur des sujets sensibles comme les droits des minorités sexuelles peuvent être contraintes par la législation locale. La politisation de l’aide publique peut également marginaliser certaines OSC.
- Vision à court terme vs. pérennisation : Les bailleurs peuvent percevoir les OSC locales comme ayant une vision à court terme, préférant canaliser les fonds via des ONGI. De leur côté, certaines OSC se contentent des financements acquis sans chercher à diversifier leurs sources, ce qui nuit à leur viabilité à long terme.
- Visibilité et crédibilité : Les OSC doivent jongler entre le besoin de visibilité pour attirer les financements et le maintien de leur crédibilité auprès des communautés locales pour ne pas être perçues comme des agents des bailleurs.
La littérature suggère que pour renforcer leur autonomie stratégique, les OSC doivent prioriser le travail en réseau, diversifier leurs sources de financement, et renforcer leurs capacités organisationnelles et financières. Il est également crucial d’assurer une meilleure mise à contribution de la population locale dans la conception des projets et de plaider pour des modalités de financement plus adaptées à leurs réalités. De plus, la reconnaissance de la valeur du savoir local des OSC est essentielle.