Principe : Freeman (1984) – Plutôt que de se focaliser uniquement sur les actionnaires (dans le secteur privé) ou les bailleurs (vision simpliste pour les ONG), cette théorie postule qu’une organisation doit identifier et gérer activement ses relations avec l’ensemble de ses “parties prenantes”. Celles-ci incluent tout groupe ou individu pouvant influencer ou être influencé par l’organisation (bailleurs, bénéficiaires, employés, volontaires, gouvernement, communautés locales, autres ONG, médias, etc.). La performance et la pérennité de l’organisation dépendent de sa capacité à comprendre et à équilibrer les attentes, parfois contradictoires, de ces différentes parties prenantes.
APPLICATION AUX ONG AFRICAINES : #
- Les ONG africaines évoluent dans un écosystème complexe où elles doivent constamment négocier avec une multitude de parties prenantes aux intérêts variés et aux pouvoirs inégaux.
- L’autonomie stratégique ne se résume pas à l’indépendance vis-à-vis des bailleurs ; elle réside aussi dans la capacité à définir ses priorités en tenant compte des besoins exprimés par les bénéficiaires/communautés, tout en respectant le cadre légal imposé par l’État et en maintenant la motivation du personnel.
- Gérer ces relations multiples demande des compétences spécifiques (négociation, communication, médiation) et la mise en place de mécanismes de redevabilité multidirectionnels (pas seulement vers les bailleurs – “upward accountability”, mais aussi vers la base – “downward accountability”).
Cas concret / Éléments d’évidence : On observe des ONG qui réussissent à renforcer leur position de négociation vis-à-vis des bailleurs en démontrant un fort ancrage et soutien de la part des communautés locales (une partie prenante clé). L’émergence et la promotion (parfois par les bailleurs eux-mêmes) d’outils de redevabilité envers les bénéficiaires (enquêtes de satisfaction, mécanismes de plainte, consultations communautaires) montrent une reconnaissance croissante de l’importance de cette partie prenante. Inversement, les conflits ou le manque de coordination entre ONG (parties prenantes concurrentes/partenaires) sur un même territoire peuvent nuire à leur efficacité et à leur pouvoir de négociation collectif.
Critique / Nuance africaine : La théorie peut être normative (comment devrait-on gérer les parties prenantes ?) et moins descriptive ou explicative des rapports de force réels. Dans de nombreux contextes africains, le poids de l’État ou d’acteurs politiques (parfois informels) comme partie prenante est prépondérant et peut limiter drastiquement l’autonomie des ONG, un aspect que la théorie générale peut sous-estimer. La définition et la représentation légitime des “bénéficiaires” ou de la “communauté” sont souvent complexes et sujettes à caution. Enfin, la théorie peine parfois à offrir des outils clairs pour arbitrer entre les demandes conflictuelles de parties prenantes très inégales en pouvoir.